François a 48 ans. Il est séropositif depuis 1986. Dépisté en 1989, il est suivi à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris depuis cette date. Il a vécu les progrès des traitements au cours des vingt dernières années. Lorsque François a été dépisté en 1989, les médecins lui ont alors proposé un traitement. Il y a vingt ans, celui-ci était encore balbutiant : « De 1989 à 1994, j’ai été traité avec ce qu’il y avait à l’époque :de l’AZT, d’autres médicaments, mais pas grand-chose. » Entre 1994 et 2002, François a traversé une période difficile. Aujourd’hui, grâce à son traitement, François vit normalement. Pourtant, alors que son univers se détériorait, François a rencontré l’amour. « Bizarrement, pour moi, c’était aussi le moment où je venais de rencontrer la personne avec qui je partage ma vie depuis vingt ans. » A cette époque, les modifications régulières de prises et d’associations de médicaments rendaient ce traitement de plus en plus difficile à suivre au long cours. La confiance était au cœur d’une relation, où l’urgence le disputait à l’empirisme. Mais la solide relation nouée entre François et son médecin lui a permis de tenir. « J’ai pris ces médicaments, c’est-à-dire que je les ai avalés consciencieusement, aux heures auxquelles il fallait les avaler tous les jours », se rappelle François. Un traitement aussi difficile à observer a obligé François à exposer clairement sa situation aux autres. Impossible de garder le secret. « A l’époque, il a fallu dire les choses de façon très claire, même si elles étaient assez claires, mais pas assez vis-à-vis de la famille, de l’entourage professionnel, etc. Il a fallu poser les choses, c'est-à-dire je suis malade du sida, j’ai le sida ... » Parallèlement, la recherche progressait. « De fil en aiguille, on est arrivé un jour au bon cocktail de médicaments, puisque, à ce moment-là, il s’est trouvé que, à plusieurs reprises, j’ai eu une charge virale indétectable, ce qui a été une grande satisfaction pour tous. » Son traitement est aujourd’hui adapté, il n’est pas susceptible de modifications régulières comme par le passé. Sa charge virale est désormais indétectable. Les progrès du traitement ont permis à François de retrouver une vie sociale. « Depuis que la charge virale est indétectable, je voyage beaucoup. » François a également repris une activité professionnelle. « Je me suis rendu compte que le travail – et, en tout cas, la place que j’occupais dans la société – était aussi un facteur d’amélioration de ma qualité de vie, de mon état physique. » Son couple a traversé les vicissitudes du traitement. Tous deux mènent une vie normale et épanouie. « Une personne qui, elle-même, est séronégative vit avec moi depuis vingt ans et n’a pas attrapé le virus du sida. » Désormais, François doit faire face à un nouveau défi : se désaccoutumer de l’accompagnement dont il a bénéficié au cours des vingt dernières années. Comme il le dit lui-même, il a besoin de reprendre « la main » sur sa vie. François souhaite se dissocier du VIH pour vivre sa vie d’individu à part entière. « Ma séropositivité, ce n’est pas moi. Je suis autre chose que quelqu’un de séropositif. Je suis aussi un séropositif depuis très longtemps, je suis aussi cette personne-là, mais je suis surtout moi. » Les progrès du traitement lui ont donné cette liberté et ce recul vis-à-vis de la maladie. Docteur Hocine Ait-Mohand, praticien attaché, service Maladies infectieuses et tropicales, hôpital Pitié-Salpêtrière (AP-HP). « Avant, les thérapeutiques avaient un problème d’efficacité et aussi des problèmes de tolérance. Il n’y avait pas beaucoup de médicaments, il y en avait trois ou quatre. On essayait de faire avec, en pratiquant des associations qui, actuellement, nous paraissent absolument obsolètes. Mais, au début, on n’avait que ça. On prenait des médicaments, on connaissait leur mode d’action. Certains faisaient mal au ventre, enfin... c’était moyen du point de vue de l’efficacité et problématique du point de vue de la tolérance. Actuellement, quand on décide de traiter un patient, ce n’est plus un problème de nombre. On a tous les médicaments qu’il faut, je dis bien tous. La décision de traiter aujourd’hui doit pouvoir tenir la route en efficacité et en tolérance pendant trente ans. Les médicaments sont bien tolérés. Toutefois, le risque, c’est la répétition de l’oubli des médicaments, surtout d’une partie des médicaments. Quand on oublie assez souvent, là, ca commence à devenir un peu embêtant, dans la mesure où ce qui reste comme médicament ne suffit pas. Désormais, il va falloir faire évoluer encore plus les mentalités et le regard de la société vis-à-vis de ces gens qui sont extraordinaires. » La section commentaire est fermée.
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Septembre 2017
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